Publié le 01/02/2008
Sur le coeur des joueurs havrais, le dragon du HAC et la mention « 1872 », sur le ciel et le marine traditionnels, rappellent que le club est le doyen
Les règles de la Football Association sont à peine fixées outre manche, et celles de la Rugby Football Union viennent juste d'être codifiée, mais le ballon ovale prend la poudre d'escampette, et passe le Chanel pour rejoindre le vieux continent au début des années 1870. Selon la légende, des britanniques originaires d'Oxford et de Cambridge, employés dans les maisons de transit du Havre, s'adonnent à un football hybride, la « Combination », sur le terrain vague situé à l'angle de l'actuel boulevard François 1er et de l'avenue Foch.
Quelques jeunes de la ville se joignent à leurs homologues d'outre manche, et sous la houlette de Frédérick Field Langstaff (qui sera Président du club de 1872 à 1884, puis de 1897 à 1900), donnent naissance, en 1872, au premier club de rugby français : le HAVRE ATHLETIC CLUB. Se pose alors la piquante question des couleurs à arborer… Le Révérend Orlebar a alors une idée de génie, destinée à satisfaire tous les joueurs de rugby du port Normand. Pour ne pas faire de jaloux, il décide d'imposer le « Dark Blue » d'Oxford et le « Light Blue » de Cambridge sur un maillot rayé, donnant ainsi au H.A.C. son bleu marine et son bleu ciel traditionnel.
La première équipe voit le jour en 1872, sous l'impulsion de Frédérick Field Langstaff
Immédiatement, le football et le rugby se dissocient en deux sections. Les adeptes de l'ovalie vont alors aller se disputer la vessie de porc dans une commune voisine, Sanvic, où à partir de 1882, le terrain de la commune, devient le fief du HAC. Après un peu plus de dix ans d'existence, la section rugby se met en sommeil, victime du succès de son homologue du football. Mais deux nouveaux membres du club, Wood et Meyer, venus former les jeunes de l'école de Commerce, permettent la relance de la section rugby du HAC en 1899. En avril de cette année, un match face au Racing Club de France, perdu par les Havrais 12-6, marque le renouveau de l'équipe, avec de prestigieux représentants du nom de Jimmy Carré, Lewis, Coulon, Meyer, Wood et Gauger.
Le début du XXème siècle au sommet du rugby tricolore
Jusqu'en 1910, le HAC tient la dragée haute au rugby tricolore
En 1900, le HAC poursuit son renouveau en traversant le Chanel pour y affronter une sélection anglaise, qui comptait alors pas moins de 10 internationaux dans ses rangs. C'est une période faste pour le club qui jusqu'en 1910, se qualifie systématiquement pour les demi finales du championnat, mais y chute également à chaque fois, toujours opposé aux solides formations parisiennes. Arrive alors le premier conflit mondial et « avec la guerre de 1914-1918, nous avons perdu beaucoup de nos joueurs dans les tranchées » explique son actuel Président, Jean-François Prevost, « il a fallu reconstruire le club, ce qui n'était pas simple dans une région où le rugby n'était pas roi ».
Mais comme la France, le H.A.C. se relève et repart de l'avant tant bien que mal. En 1925, le stade prend le nom de Langstaff, en mémoire de William Ramsay Langstaff (fils aîné de Frédérik Field, et Président de 1901 à 1925), et voit les venues de Tarbes ou de Pau comme gage de la qualité encore présente du HAC… ce sont malheureusement les derniers fait d'armes de l'ovalie havraise. En effet, l'exode de la colonie anglaise après le conflit, la jeunesse normande qui se tourne de plus en plus vers le ballon rond, ou encore les mécènes qui se tournent vers les clubs du Sud ouest … donnent du fil à retordre à l'équipe. Au début des années 30, les dirigeants, presque tous anciens joueurs, restent fidèles à leurs couleurs, et participent à attirer les meilleurs joueurs locaux dans leur rang… ce qui, du fait des difficultés financières croissantes, est de plus en plus compliqué. Dès lors, la priorité est à la formation.
Dans les années 20, le HAC vit ses dernières heures de gloire
C'est sans compter l'explosion du second conflit mondial. Le stade Langstaff est bombardé, et les tribunes sont détruites, privant le H.A.C. de son fief. Au cours de cette guerre, un événement tragique va donner au club son état d'esprit actuel. « C'est arrivé alors que nous effectuions un déplacement à Fecamp » explique Jean-François Prevost. « Les gars ont fait le voyage dans un camion gazogène, et sur la route, un avion anglais les a mitraillé. Un joueur est mort, et le chauffeur mortellement touché a eu la force et le temps de garer le véhicule sur le bord de la route avant de rendre l'âme ». A la Libération, cet épisode va être immédiatement suivi d'une belle preuve de la fraternité havraise quand les dirigeants aidés des joueurs reconstruisent le terrain, les tribunes et les vestiaires.
Dans les années 60, le renouveau peut commencer…
Petit à petit le club refait surface
Dans la continuité de ces faits, le club a perduré autours d'un esprit d'équipe fort mais il faudra une dizaine d'année pour que les efforts payent. Et avec le soutien de son Président de l'époque, également Président du port autonome du Havre, le club se garantit toute déconvenue financière et accède lors de la saison 1965-1966 à la troisième division. A cette période, il devient également un club novateur en étant l'un des premiers à créer une équipe féminine. Petit à petit le club grandit et parvient à se stabiliser en Fédérale 3, frôlant même la montée à plusieurs reprises.
En 1969, l'équipe féminine du HAC, l'une des premières en France, voit le jour
Aujourd'hui, le terrain vague de 1870 a été remplacé par des résidences, mais l'identité havraise est toujours là, et son Président le revendique : « Lorsque je suis arrivé, le ciel et le marine étaient toujours les couleurs du H.A.C., mais il y avait des motifs différents selon les catégories, voir même des tailles de rayures différentes dans le même jeu de maillot. Ma première volonté a été de redonner l'identité propre du club, à savoir revenir au maillot traditionnel, ciel et marine cerclés. Je suis allé voir les investisseurs privés, car jusque là nous nous étions restreint aux publics, et nous y sommes parvenus ».
Les bâtiments résidentiels ont remplacé le terrain vague des débuts, à l'angle de l'actuel boulevard François 1er et de l'avenue Foch
Et fort de cette volonté et de cet apport financier, le H.A.C., deuxième de sa poule n'a jamais été aussi proche d'accéder à l'échelon supérieur, la Fédérale 2. Mais le club se heurte à des difficultés locales. « Nous sommes sur une terre qui attire peu les investisseurs dans le rugby. Par ailleurs, nous avons un terrain privé et il faut trouver les fonds nécessaires à son entretien. En début de saison il me faut environ 32.000€ de fonctionnement rien que sur les infrastructures, choses qui ne serait pas le cas si le stade était municipal » avoue le Président du Havre Rugby Club. « Mais j'y croît et il faut montrer qui nous sommes et ce que l'on veut ».
La montée en Fédérale 2 dans le viseur
Ce que le club veut, c'est la montée, et si elle effective en fin de saison, elle sera bien évidemment acceptée mais il faudra accélérer les choses. Jean-François Prevost en est conscient, et des opérations comme les Journées des Ambassadeurs le rassurent. « Je suis certain que cela peut réellement nous donner un coup de pouce. Aujourd'hui j'ai rencontré des chefs d'entreprise dont les enfants sont au club, et que je ne connaissais pas. Hors si l'on monte il faut au minimum tripler le budget, tous ces contacts seront utiles ».
Jean-François Prevost, Président du HAC a redonné son identité au club…
D'autre part, le H.A.C. peut s'appuyer sur un atout énorme que constitue sa formation, devenue essentielle depuis la seconde guerre mondiale. En effet, si deux cadres de Rouen, pensionnaire de Fédérale 1, viennent du club, l'équipe normande a fourni plusieurs hommes à l'élite du rugby tricolore, comme Benjamin Dechartres, 2ème ligne à Tarbes, Guillaume Devade, centre à La Rochelle, et le plus connu d'entre tous, David Auradou, plusieurs fois Champion de France avec le Stade Français et ayant cette saison rejoint les rangs du Racing Métro 92.
Une formation qui a fait ses preuves et qui continue d'évoluer pour le plus grand plaisir du Président du club. « Nous avons environ 200 moins de 15 ans au club, et pour plusieurs catégories, nous avons, pour pallier aux lacunes techniques, instauré un troisième entraînement en semaine. Mais pas n'importe comment. Avant la session, ils travaillent avec les professeurs des collèges et nous développons leurs qualités rugbystiques en suivant. Ainsi, ils rentrent chez eux le soir, meilleurs, et les devoirs faits. Tout le monde est content, car nous faisons du sportif mais aussi du social ! »
Deuxième de sa poule, le HAC frôle aujourd'hui l'accession à la Fédérale 2…
En se rendant au Havre pour leur première étape de la saison, les Journées des Ambassadeurs ont effectué un véritable retour aux sources. Et en rencontrant un club doyen, elles ont trouvé un club fier et respectueux de ses origines et qui se doit d'évoluer. « Nous sommes prêts à faire les efforts nécessaires pour monter, en recrutant quelques briscards, qui devront être complémentaires avec notre jeune groupe actuel » explique Jean-François Prevost. Mais à le voir observer les minots des écoles de rugby de la région évoluer au milieu des joueurs pros, on se rend rapidement compte, que même si le professionnalisme est allé à la rencontre de la tradition, bouclant ainsi la boucle de l'évolution rugbystique, il portera haut cette identité havraise qui fait sa force depuisbientôt 140 ans…
Crédits photos : HAC Rugby
SIte officiel du club : http://hacrugby.com/
..